« Sô-Ava Voodoo Lake » : à la découverte du Vaudou

(par Ambre Delcroix et Olivier Thibaud)

C’est à l’UNESCO-Paris qu’a été présenté en avant première le 8 septembre dernier le film-documentaire « Sô-Ava Voodoo Lake » .


La présentation à l'UNESCO

L’événement était porté par l’ambassade du Bénin à Paris et placé sous le patronage de la Présidence de la République du Bénin et de son ministère du Tourisme, de la Culture et des Arts.


Karine Dellière, initiée au Vaudou

C’était l’occasion de faire découvrir pour la première fois le documentaire réalisé par Karine Dellière, une Française initiée au Vaudou depuis plus de vingt ans.

Elle porte aujourd’hui le titre de « Tangninon » , c’est à dire de conseillère traditionnelle dans le Vaudou du roi Toygbe Zola .


Sur les bords du lac Nokoué 

À la découverte du Vaudou originel et loin des clichés, « Sô-Ava Voodoo Lake » est un documentaire qui donne la parole aux habitants du lac Nokoué dans leurs pratiques qui perdurent depuis plusieurs siècles.

Cette culture spécifique du lac est aujourd’hui en danger et le roi Toygbe Zola cherche à la protéger.


Danse cérémonielle

Il a donc autorisé de filmer les cérémonies et la vie quotidienne de ces populations…

Loin des clichés véhiculés encore aujourd’hui, il s’agit de montrer une autre image du Vaudou séculaire, intégrée à la vie quotidienne, de manière à permettre aux diasporas du Brésil, d’Haïti, de la Nouvelle-Orléans , de Cuba , … de se réconcilier avec leurs origines .


Sur les bords du lac Nokoué

Dès l’âge de vingt ans …

C’est en 2000 qu’à l’âge de vingt ans Karine Dellière part étudier le fonctionnement du port autonome de Cotonou pour son mémoire de mastère en géographie.

Elle était la seule personne européenne à y travailler.

Dans son foyer d’étudiants, déstabilisée par les codes africains qu’elle ne connaissait pas, elle rencontre un groupe de jeunes ghanéennes venues apprendre la langue française .

Ces dernières lui ont alors tout appris : à communiquer, s’habiller, négocier, faire à manger, etc.

Elle choisira finalement de vivre au Bénin durant dix ans, tout en faisant des allers-retours entre la France et le Bénin .

Elle intégrera la culture chamanique de sa grand-mère finlandaise et la pratique du Vaudou auquel elle est initiée. 

« Ce documentaire de 26 minutes n’est pas un mode d’emploi du Vaudou mais bien une petite porte par laquelle on entrerait sur le lac en abandonnant notre vision occidentale pour goûter à une culture différente régie par le Vaudou comme philosophie universelle, » précise Karine Dellière .

Le film-documentaire Vaudou signifie littéralement « être bien avec ».

Très loin des images de possession, de poupées vaudoues garnies d’épingles, de sacrifices, de sorcellerie, il se base sur des valeurs telles que l’équilibre de la nature, le respect des ancêtres, la communication avec les divinités.

Des interviews de femmes, de pêcheurs, du roi Toygbe Zola, de la « Tangninon » (autrement dit la gardienne spirituelle du roi) , de membres de la cour royale, du maire… expriment ce qu’est le Vaudou du quotidien. 

Des scènes de cérémonies permettent par ailleurs de percevoir le rapport entre le visible et l’invisible . 

Ainsi, ce sont les messages et les craintes de ces populations qui sont retranscrites dans le cadre mystérieux du lac Nokoué.

Laurent Hounsavi, pour la bande originale

Une bande originale de Laurent Hounsavi reprend des chants traditionnels avec un regard sur l’avenir .

Les villages qui bordent le lac Nokoué restent préservés de l’influence extérieure.

Pour y accéder, les visiteurs ne peuvent qu’emprunter un chenal qui conduit à la célèbre cité lacustre de Ganvié, inscrite depuis 1996 sur la liste indicative de l'UNESCO qui précède un classement mondial au patrimoine de l’humanité .

Aucune autorisation n’a jamais été donnée par le roi de la communauté pour filmer et photographier les pratiques vaudoues de l’intérieur.

Les populations qui n’avaient jamais été filmées (cour royale, roi, représentants spirituels, habitants du lac, pêcheurs, enfants, vieilles femmes gardiennes des danses ancestrales…) ont accepté de l’être alors qu’il s’agit d’une culture où l’on craint l’image . 


A la tombée de la nuit

« Cette expérience nourrit ma conviction qu’un documentaire, vu de l’intérieur, et avec tous les codes en main, permettrait de valoriser différentes dimensions de cette communauté et de son rapport à la spiritualité afin de préserver cette culture en extinction, mais également de réconcilier les diasporas africaines, haïtiennes, cubaines, brésiliennes, de la Nouvelle-Orléans, ... avec leur culture originelle, » note  pour conclure Karine Dellière.

A l'issue de la présentation : SEM Eusèbe Agbangla, ambassadeur près l'UNESCO, et Ambre Delcroix, journaliste



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