Si la pêche à la morue a fait la prospérité de Saint-Pierre-et-Miquelon durant plusieurs siècles, la contrebande d'alcool a assuré sa fortune durant une quinzaine d'années :
les années de la Prohibition.
« Bootlegger » est un terme américain qui signifie « l’homme qui cache une bouteille dans sa botte » et désigne un contrebandier d'alcool.
Apparu pendant la guerre de Sécession, le terme est par la suite utilisé pour les contrebandiers de la période de Prohibition qui a été instaurée aux États-Unis et au Canada entre les années 1919 et 1933.
Les bouteilles pouvaient alors avoir une forme recourbée (la flasque), pour mieux s'insérer dans les bottes.
La Prohibition a fait les beaux jours des distillateurs clandestins, des petits passeurs transfrontaliers, des revendeurs, des débits de boisson écoulant des alcools souvent frelatés (les « speakeasies »), des capitaines de navires impliqués dans le transport des liquides interdits et surtout, des gangs aux racines mafieuses qui contrôlaient tous ces réseaux, de New York à Chicago, pour empocher de juteux bénéfices au prix de règlements de comptes souvent sanglants.
Al Capone fut le plus célèbre et important chef de ces gangs mafieux :
c’est lui qui avait la haute main sur le trafic en provenance de Saint-Pierre-et-Miquelon !
Au cours de cette quinzaine d'années, les trafics d'importation d'alcool furent marqués par quelques faits saillants :
- l'importation de rhum de Guyane anglaise (depuis Georgetown) notamment le Demerara (Black Diamond) à bord de goélettes qui mouillaient à trois milles des côtes, limite des eaux territoriales américaines. La marchandise était alors transbordée (souvent de nuit) à bord de bateaux rapides à moteur (les « rum runners », les « banana boats » ou le fameux shooner goélette canadien Nellie J. Banks) chargés de débarquer au plus vite, en des lieux secrets du littoral, la marchandise attendue par les bootleggers.
- l'âge d'or des îles Saint-Pierre-et-Miquelon, plaque tournante providentielle du trafic en provenance d’Europe. Les alcools étaient acheminés par pleins cargos (goélettes ou vapeurs) en provenance de France métropolitaine, puis ils étaient débarqués et reconditionnés dans des sacs de jute (plus faciles à jeter par dessus bord aux fins d’effacer toute preuve en cas d’arraisonnement par les douaniers) et déclarés en douane (destination la haute mer) pour des droits de mer dérisoires.
- de petites unités chargeaient les caisses, en assuraient le transport jusqu'aux rum runners (voir ci-dessus). Des importateurs saint-pierrais notoires étaient Henri Morazé et R. de la Villefromoy qui communiquaient avec leurs acheteurs à l'aide de télégrammes codés
La période faste des bootleggers
L'archipel a eu un rôle majeur lors de la prohibition aux États-Unis puisque du fait de son statut de colonie française, la loi américaine (le « Volstead Act ») n’y était pas applicable. L'île connut donc, de 1919 à 1933, une réelle prospérité grâce au trafic d’alcools, de vins français et de whisky, acheminés clandestinement sur les côtes canadiennes et américaines par des goélettes, vapeurs ou vedettes rapides (rhum runners) construites au Canada et montées par des Saint-Pierrais.
Ce fut l'époque des bootleggers.
Les pêcheurs se transforment alors en dockers et en transporteurs.
Ils équipent même certains de leurs bateaux de moteurs d’avion (!), de machines à fumée et de systèmes de communications cryptées ((la TSF – Téléphonie sans fil – était apparue sur les bateaux au début des années 1920)., histoire de semer les gardes côtes américains.
Les pêcheries sont reconverties en entrepôts, les patrons deviennent courtiers…
Les gangsters américains s’approvisionnent auprès d'eux.
Al Capone y aurait fait une visite : Il aurait passé une nuit à l’hôtel Robert et y aurait même laissé son chapeau.
Mais à la vérité il se serait plutôt fait représenter par l'un de ses lieutenants qui aurait offert pour l'occasion un grand banquet aux marins de l'archipel pour sceller leur alliance d'un genre nouveau.
Mais à la vérité il se serait plutôt fait représenter par l'un de ses lieutenants qui aurait offert pour l'occasion un grand banquet aux marins de l'archipel pour sceller leur alliance d'un genre nouveau.
En 1923, 5 millions de bouteilles transitent par Saint Pierre !
Jusqu'en 1933, date où la prohibition est levée, c'est quelque 300 000 caisses d'alcool passent par an dans l'archipel. Le bois des caisses d'alcool abandonnées sert de combustible et à la construction de nombreuses maisons, parmi lesquelles la villa Cutty Sark, entièrement réalisée à partir de caisses de whisky éponyme.
Dans les années 1970, on pouvait encore voir à Saint-Pierre, un hangar bardé des planches de caisses d'alcools, de champagnes français.
Les marins de l'archipel recevaient donc les boissons alcoolisées en caisses. Ils les transféraient dans des sacs de jute et récupéraient le bois. En cas d'interception d'un bateau contrebandier par les garde-côtes américains, il suffisait de jeter les sacs à la mer par le bord du navire opposé à celui vers lequel avançaient les forces des douanes. Les sacs coulaient instantanément. Lorsque l'équipage de contrôle embarquait, il n'y avait plus trace de la fraude partie vers les grands fonds. La cargaison était perdue, mais cela évitait aux contrevenants d'aller croupir en prison. Le risque d'être ainsi arraisonné faisait partie des frais de l'expédition et justifiait le prix ahurissant que payaient les destinataires.
Ceci expliquait aussi la prolifération de boissons contrefaites peut-être moins chères que celles provenant vraiment d'Europe…
A lire :
A lire :
Une femme "bootlegger" cache une flasque d'alcool dans sa botte
Les caisses d'alcools arrivaient de France par goélettes ou par vapeurs
Proche du Canada et des Etats-Unis,
Saint-Pierre-et-Miquelon bénéficiait d'une situation géographique privilégiée
La fameuse goélette Nellie J. Banks :
très rapide à la voile, elle bénéficiait d'un puissant moteur d'appoint
La morue assura longtemps la prospérité de Saint-Pierre-et-Miquelon
Déchargement de champagne à Saint-Pierre-et-Miquelon
Un rhum runner
Les bootleggers posent avec la puissante Ford A V8 3.3 de 40 ch de John Dillinger, ennemi public numéro 1.
Equipé d'un tel engin qui dépasse les 100 km/h (un record pour l'époque), John réussit toujours à semer le FBI.
Le 22 juillet 1934 John Dillinger est identifié par le FBI à Chicago alors qu'il quitte le cinéma après avoir vu le film "Manhattan Melodrama" ("L'Ennemi public n°1" en français, ça ne s'invente pas !) avec Clark Gable.
C'est alors que le gangster est tué par trois balles tirées par le FBI…
Alambic clandestin
Saisie d'alcools
Distillerie clandestine
Alambic clandestin
Deux femmes bootleggers
Destruction d'une saisie d'alcool
Saisie d'alcools
Saisie des douanes :transbordement des sacs de jute contenant des bouteilles d'alcool depuis un doris
Edition "Prohibition" du fameux whisky Cutty Sark
Al Capone avait la haute main sur la contrebande d'alcool de l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Arrêté pour fraude fiscale, il est incarcéré à Alcatraz .
Il pose ici à la une de Time !
Parrain de la mafia de Chicago entre 1925 et 1932, Al Capone, surnommé "Scarface", est la figure du crime organisé américain pendant la Prohibition.
L'un des symboles de la puissance d'Alphonse Capone est sans conteste sa Cadillac modèle 341A Town Sedan V8 . Peinte en vert et noir, la voiture ressemble alors comme deux gouttes d'eau aux Cadillac de la police de Chicago. Elle s'équipe même de la panoplie complète du véhicule de police avec le gyrophare, la sirène et le récepteur d'ondes radio. Pour protéger la voiture et par la même occasion sa personne, Al Capone ordonna que la voiture soit équipée d'une carrosserie blindée pesant près de 3 500 kg.
Le réservoir d'essence était doublé d'acier.
Le pare-brise et les fenêtres anti-balles avaient 4 à 5 cm d'épaisseur
Elle était équipée d'une vitre arrière amovible, pour que le tireur puisse opérer plus commodément sur un éventuel poursuivant .
Elle était dotée d'un coffre rempli d'armes camouflé derrière la banquette arrière.
Ironie de l'histoire, la Cadillac d'Al Capone était tellement sûre et robuste que la Maison Blanche l'utilisa par la suite pour les déplacements du président Franklin Roosevelt !
Al Capone pose devant sa Cadillac blindée avec une partie de son clan
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